Marisol Touraine doit présenter début octobre un texte visant à la mise en place de « salles de consommation contrôlée de stupéfiants ».
Marisol Touraine, la ministre des Affaires sociales et de la Santé, ne perd pas de temps. Lors du premier Conseil des ministres du mois d'octobre, elle présentera un projet de loi permettant de mettre en place des «salles de consommation contrôlée de stupéfiants», souvent appelées «salles de shoot».
«À titre expérimental et pour une durée de six ans à compter de la date d'ouverture du premier espace», dispose le projet de loi, «les centres d'accueil et d'accompagnement à la réduction des risques pour usagers de drogues mentionnés à l'article L. 3121-5, désignés par arrêté du ministre chargé de la Santé (…), mettent en place un espace ouvert au public de réduction des risques par usage supervisé, dans le respect d'un cahier des charges national».
Il y a un an, l'annonce de la création d'une première «salle de shoot», Gare du Nord, à Paris, à l'initiative du premier ministre de l'époque, Jean-Marc Ayrault, avait entraîné un vif débat entre associations et collectifs de riverains. Des institutions comme les Académies de médecine et de pharmacie avaient également exprimé leur réticence, voire leur opposition.
Le Conseil d'État avait tranché, estimant qu'un «lieu de consommation de drogue à moindre risque» n'était pas conforme à la loi de 1970 sur les stupéfiants, ce texte instaurant notamment le principe de prohibition totale de la consommation de drogue. Le Conseil d'État avait recommandé d'«inscrire dans la loi le principe de ce dispositif pour plus de garantie juridique».
C'est chose faite. Mais la colère gronde du côté des détracteurs. Yannick Moreau, député UMP de Vendée, entend mettre à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale le vote d'une proposition de résolution prenant partie pour «une politique de santé publique axée sur les soins, le sevrage, ainsi que la prévention précoce et sans démagogie des jeunes au fléau de la drogue et à une politique pénale ferme et répressive à l'endroit des trafiquants de drogue» et rappelant «fermement que la France est liée par des engagements internationaux ratifiés qui s'imposent à nos lois». Dans un courrier à Jean-Marc Sauvé, vice-président du Conseil d'État, il alerte «sur l'instrumentalisation que cherche le gouvernement dans cette affaire en visant un blanc-seing juridique dont il se prévaudra».
La crainte «d'un système pérenne»
L'association Parents contre la drogue, à l'origine de la saisine du Conseil d'État, fait remarquer par la voix de son président Serge Lebigot: «Six ans, ce n'est plus une expérimentation mais la mise en place d'un système pérenne. De plus, le projet de Jean-Marc Ayrault prévoyait une seule salle de shoot. Ce sont désormais autant de salles que le voudra le ministère qui seront ouvertes.»
De leur côté, les partisans d'une telle mesure se réjouissent avec modération: si l'annonce de salles de consommation liées aux centres de prévention est «une bonne nouvelle» pour eux, en revanche, ils redoutent que «juridiquement le projet ne soit pas plus solide que l'initiative précédente» et attendent le verdict du Conseil d'État. Les positions des médecins sont nuancées. Michel Lejoyeux, chef de service à l'hôpital Bichat, déplore qu'«en temps de pénurie budgétaire on ne donne pas la priorité aux fléaux de masse comme l'alcool ou le tabac».
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