En débarquant lundi en France, le service de vidéo illimitée de l'américain Netflix bouscule déjà tout le secteur audiovisuel français et sa règlementation rigide pour protéger la production française.
Netflix devrait proposer dès lundi une offre de vidéo illimitée à moins de 10 euros par mois, mais uniquement par internet, faute d'un accord avec Free, Orange, Bouygues ou Numericable. Un handicap sur un marché français ou plus de trois quarts des foyers regardent la télé via des box ADSL, câble ou satellite.
Netflix a pour atout son vaste catalogue de séries et films américains et un puissant moteur de recherche et de suggestions. Il vise 2 millions d'abonnés en France dans les 5 ans.
Netflix et ses équivalents sont aux films et aux séries ce que le service musical en ligne Deezer est à la musique : des vidéos où on veut, quand on veut et autant qu'on veut. L'antithèse de la télé à heure fixe ou de l'achat de films à la pièce. Un modèle low-cost déjà plébiscité par 36 millions d'Américains.
Ce débarquement a réveillé le marché balbutiant de la vidéo sur abonnement (SVOD) en France, où les opérateurs préféraient promouvoir la vidéo à la carte, bien plus lucrative.
Ces derniers jours, plusieurs concurrents français ont dégainé. Canal+, dont la télévision payante à 40 euros par mois est pourtant concurrencée par ce modèle, a renforcé son offre illimitée CanalPlay, déjà forte de 520.000 abonnés. Ce service bon marché est pour l'instant déficitaire, tout comme Netflix ailleurs qu'aux Etats-Unis.
Numericable va lancer “Sérieflix”, centrée sur les séries, SFR multiplie les forfaits mensuels, Orange propose l'offre de la plateforme Jook, son bouquet OCS a lancé OCS Go. Sans oublier des indépendants comme FilmoTV et les géants japonais Rakuten et américain Amazon qui veulent aussi se lancer en France.
– Connu d'un quart des internautes français –
De quoi doper un marché de la vidéo sur abonnement qui, en 2013, ne représentait que 28 millions d'euros, selon les cabinets NPA Conseil et GFK, dix fois moins que la vidéo à la carte.
“Pour 2014, le marché de la vidéo sur abonnement pourrait atteindre 35 millions d'euros, dopé par Netflix. Mais cela reste très faible par rapport à la vidéo à la carte, alors qu'aux Etats-Unis, la vidéo par abonnement est devenue majoritaire”, souligne Pascal Lechevallier, consultant médias.
Bien que basé à l'étranger, Netflix contribuera au financement de la production audiovisuelle française : il devra verser 2% de son chiffre d'affaires en France au Centre national du cinéma (CNC), comme le prévoit la loi de finances 2015. Et en raison de l'harmonisation de la TVA européenne, à partir du 1er janvier, il paiera sur ces recettes françaises la TVA française.
En revanche, avec son siège aux Pays-Bas, il échappera à l'impôt sur les sociétés.
Netflix échappera aussi à l'obligation de signalétique d'âge et au pourcentage minimum de 60% de contenus européens et 40% de contenus français dans son catalogue. Il ne devra pas non plus s'assurer que 12% de ses recettes proviennent de visionnage de programmes français ou sont investis dans des productions françaises.
Pour autant, le groupe ne veut pas la guerre. Sans y être légalement tenu, il a décidé de respecter la “chronologie des médias” imposée à ce type de service : il ne va proposer des films que 36 mois après leur sortie en salle en France — aucune contrainte ne s'applique aux séries. Autre geste de bonne volonté, il va produire une série en France, “Marseille”.
Sans publicité, Netflix est déjà connu de 24% des internautes français et de 42% des 15-24 ans, selon un sondage de Médiamétrie. Mais seuls 1% sont abonnés à ce type de service.
L'arrivée de Netflix et de ce mode de consommation boulimique de contenus est un choc culturel face à des règles historiques comme l'interdiction du cinéma le mercredi et le samedi soir à la télévision ou les quotas de production française. TF1 et M6 commencent d'ailleurs à réclamer l'allègement du “carcan” administratif, alors que le patron de Netflix Reed Hastings prédit la fin de la télévision traditionnelle.
Source AFP
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